Les jardiniersCe sont les génies qui écrivent en respirant, respirent de l'écriture. Ils n'ont prévu absolument aucun plan et leur histoire se dévoile au fur et à mesure qu'ils l'écrivent. Pour eux, pas de brouillon, le premier jet sera la version définitive. Et elle sera parfaite. Ils ont planté chaque mot avec attention et les regarde grandir, arrosés par leur écriture. Ils ne maîtrisent absolument rien et c'est ça qui fait leur force. Bien entendu, rien qu'à lire ces descriptions, vous vous rendez compte qu'il s'agit d'extrêmes. On les présente toujours comme opposés. Généralement, on encensera le jardinier. C'est ça que doit être un écrivain ! Tout ce qu'il écrit est parfait du premier coup. Il respire la créativité. Alors que l'on présente l'architecte comme contre créatif. Où est le processus créatif ? Ils font autant de recherches que quelqu'un devant écrire un mémoire sur le service du thé au Japon au 16ème siècle (je n'aurais jamais dû choisir ce sujet). Il n'y a rien d'amusant à écrire comme ça.
Évidemment, la réalité est loin de tout ça. Et cela ne surprendra personne si je dis que l'on est tous un savant mélange d'architecte et de jardinier. On peut se sentir peut-être plus proche de l'un ou de l'autre mais on alternera généralement l'architecte et le jardinier en nous. Par exemple, vous pouvez très bien être quelqu'un qui a développé les événements de son histoire au plus petit détail près. Mais vous ne connaissez absolument rien de vos personnages et c'est au moment de les écrire que vous les découvrirez. Ou complètement l'inverse. Vous connaissez vos personnages sur le bout des ongles mais vous ignorez où ils vont vous emmener dans leur histoire. Ou encore, vous connaissez les grands nœuds de votre histoire, mais vous ignorez comment vous les atteindrez. Concernant leurs défauts, avec un architecte, à force de prévoir et prévoir, on n'écrit jamais l'histoire ou alors on est coincé au chapitre 1 parce qu'on le réécrit à l'infini pour qu'il soit "parfait". Quant au jardinier, à regarder l'histoire s'écrire elle-même, parfois on part dans des dimensions absolument improbables, et l'on se retrouve coincé, incapable de continuer à écrire. (Et pour régler ça, c'est souvent une déviation qui a eu lieu une centaine de pages plus tôt, et que l'on va devoir toutes supprimer.) Personnellement, pendant très longtemps, j'ai rejeté l'architecte car "un véritable écrivain ne peut être qu'un jardinier" (non). Mais avec le temps passant, je me suis rendue compte que j'aimais beaucoup l'architecte car j'ai une certaine tendance à vouloir maîtriser tout ce qui se passe autour de moi. Je continue à beaucoup apprécier le jardinier qui va soudainement me faire écrire un point auquel je n'aurais jamais pensé mais qui est en fait, véritablement nécessaire à l'histoire (mais parfois je ne le découvrirai que bien plus tard). Je pense donc qu'il est important de voir ce que l'architecte comme le jardinier ont à nous apprendre, à voir ce qui marche pour nous, ce qui ne marche pas. Et continuer à écrire. De qui vous sentez-vous le plus proche ? L'architecte ou le jardinier ?
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ChalilodimunPrincipalement créatrice de mondes imaginaires. Dessine quand elle ne se bat pas avec ses chats qui veulent toujours plus de croquettes. Catégories
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Août 2022
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